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Formation > Étude de la bible > Évangile de Jean vulgarisé

Jean m'a parlé de son ami Jésus

par Roger Gauthier, o.m.i.

Le texte ci-contre
raconte un épisode de
l'Évangile selon
Saint Jean.

Il est reformulé
dans un langage populaire
dans le but de nous aider
à découvrir le Christ
comme Jean a pu le
percevoir.

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Un beau miracle mal compris

Après cette confrontation avec des pharisiens, Jésus décida qu’il valait mieux nous éloigner de ce milieu religieux trop fermé. Nous avons traversé la mer de Galilée (ou lac de Tibériade). Une grande foule de gens nous suivit. Nous en étions tout heureux, mais Jésus nous mit en garde : certains parmi eux étaient intéressés uniquement par ses miracles plutôt que par l’accueil du message que le Père lui avait confié. Je dois avouer que, sur le moment, nous n’avons pas compris exactement ce qu’il voulait dire. En vérité, nous aussi aimions bien voir ses miracles, même si nous aimions beaucoup l’écouter nous parler de son Père.

multiplication des painsComme la Pâque approchait, il en profita pour attirer l’attention des gens sur le projet d’amour de son Père qui voulait sortir le monde de l’esclavage. Il choisit donc un endroit surélevé pour être vu de tous et nous parla longtemps. Comme il le faisait souvent, il évoqua encore l’histoire de la libération du Peuple de Dieu par Moïse à la sortie d’Égypte. Il était intarissable. Personne ne bougeait. André, le frère de Simon Pierre, souligna discrètement à Jésus que les auditeurs devaient sentir la faim et qu’il faudrait penser comment on pourrait nourrir une foule pareille dans cet endroit isolé? Je crois que Jésus voulut tester jusqu’où nous lui faisions confiance; il dit à Philippe : « Où pouvons-nous acheter assez de pains pour que tous mangent à leur faim? » Troublé par cette question sans réponse possible, Philippe répondit : « Même avec deux cents deniers de pain, ça ne suffirait pas pour en donner un petit morceau à chacun. » André, le frère de Simon Pierre, se doutait bien que Jésus n’était pas désemparé et lui exprima naïvement sa suggestion : « Il y a là un garçon qui possède cinq pains d’orge et deux petits poissons : évidemment c’est bien peu pour tant de gens ». Jésus comprit qu’au moins un disciple se fiait à lui. Il nous fit participer à la solution. « Faites-les asseoir » nous dit-il. C’était vraiment une grande foule; nous avons dû les répartir par groupes restreints. Heureusement, il y avait beaucoup d’herbe à cet endroit : ils purent s’asseoir confortablement. Alors, Jésus se recueillit, pria sur les pains et sur les poissons, rendit grâce à son Père pour cette nourriture offerte et nous demanda de faire la distribution. Après l’histoire du vin à Cana, nous savions maintenant que tout était possible. De fait, il y eut à manger pour tout le monde et chacun put en redemander jusqu’au rassasiement. À la fin, Jésus nous demanda de ramasser les morceaux qui restaient afin que rien ne soit gaspillé de ce que le Père nous avait donné : on en remplit douze paniers.

C’est alors que la situation s’est gâtée. Pendant que nous ramassions les restes, nous entendions des chuchotements qui revenaient toujours à ceci : « Cet homme est vraiment le Prophète attendu depuis toujours ». Et ils parlaient de le porter en triomphe comme le Roi des juifs. Certains parmi nous, surtout Pierre et Judas, ne s’y seraient pas opposés. Jésus comprit ce qui se tramait. Il en fut déçu et nous confia de renvoyer la foule en disant qu’il avait besoin de parler avec son Père dans le silence de la montagne.

Depuis quelque temps, nous sentions bien qu’un problème le tracassait. Plus tard, il nous en a parlé clairement. Son Père et lui avaient décidé qu’il viendrait vivre sur la terre pour amener toute l’humanité à se lier d’amour avec un Dieu familier, tendre et miséricordieux. On avait si longtemps craint la toute-puissance qui lui donnait un visage surtout dominateur et exigeant. Or quand Jésus faisait un miracle, il voulait avant tout en faire le signe de la tendresse de son Père, mais presqu’à chaque fois, les gens s’attachaient à lui comme à l’envoyé de la puissance divine, venu solutionner miraculeusement leurs souffrances quotidiennes. S’il ne faisait pas les miracles souhaités, (comme à Nazareth), on ne le regardait plus comme l’envoyé de Dieu. Plus tard, quand il nous rappelait le souvenir de la foule prête à le faire roi, il disait avoir parlé de ce problème avec son Père durant une nuit presque entière : comment faire confirmer sa mission par le Père à l’occasion d’interventions miraculeuses sans que les gens s’accrochent à la manifestation de la puissance plutôt qu’au témoignage d’amour?

Ce soir-là, la foule ne voulait pas se disperser, elle attendait Jésus pour le porter en triomphe. Ce fut en vain. Elle finit par quitter après la promesse que nous le retiendrions ici à son retour de la montagne. Pour notre part, nous étions habitués à le voir disparaître pour prier son Père. Pourtant, cette fois-ci l’absence se prolongeait : la nuit commençait déjà, et pas de Jésus. Nous sommes même descendus sur le rivage, avons scruté le lac au cas où il se serait éloigné de la foule dans une barque : toujours rien.

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