Par le Père Yvon-Michel Allard, s.v.d., directeur du Centre biblique des Missionnaires du Verbe Divin, Granby, QC, Canada.
Ils vinrent donc en hâte et trouvèrent Marie, Joseph et le nouveau-né couché dans la crèche. Ayant vu, ils firent connaître ce qui leur avait été dit de cet enfant; et tous ceux qui les entendirent furent étonnés de ce que leur disaient les bergers. Quant à Marie, elle conservait avec soin toutes ces choses, les méditant en son cœur. Puis les bergers s'en retournèrent, glorifiant et louant Dieu pour tout ce qu'ils avaient entendu et vu, suivant ce qui leur avait été annoncé. Et lorsque furent accomplis les huit jours pour sa circoncision, il fut appelé du nom de Jésus, nom indiqué par l'ange avant sa conception.
Premier jour de l’année… Journée mondiale de la paix ! Au temps de Marie, on désirait la paix autant qu’aujourd’hui. Ça faisait 200 ans que le monde d’alors était en guerre tout autour de la Méditerranée. L’empereur César Auguste avait vaincu tous les ennemis de Rome et les peuples soumis avaient baissé la tête. Il avait alors décrété la «pax romana», une paix qui était le résultat de toutes les victoires de Rome sur les peuples soumis à son Empire... C’était le silence des vaincus et César avait pu fermer le temple de Janus, le dieu de la Guerre.
Le grand auteur romain Cornelio Tacitus, qui comprenait bien les conséquences souvent désastreuses de ces guerres de conquête avait écrit: «Là où ils sèment la désolation, ils appellent cela paix !» C’est la paix des grands cimetières... C’est la paix résultant des bombes atomiques d’Hirochima et de Nagasaki! C’est la paix offerte aux 50 millions de cadavres de la seconde guerre mondiale. On peut visiter aujourd’hui les grands cimetières militaires d’Europe, avec leurs innombrables croix blanches, comme par exemple ceux du Mont Cassin, en Italie : cimetières allemand, Anglais, Polonais, Américain… Chaque pays a son cimetière mais ici, tous sont unis et tous sont égaux dans la mort ! Triste réalité et paix bien tardive.
Au moment où César Auguste proclamait à Rome la «pax romana», en Palestine, les anges annonçaient la naissance de Jésus et donnaient un sens bien différent au mot paix : «Paix sur la terre à ceux et celles qui sont aimés de Dieu!» (Lc 2, 14). Le Christ dira : «Heureux les artisans de paix. Ils seront appelés fils et filles de Dieu» (Mt 5,9). Chez Isaïe 2, 4, nous retrouvons ce verset plein d’espérance : «Ils briseront leurs épées pour en faire des socs et leurs lances pour en faire des serpes. On ne lèvera plus l’épée nation contre nation, on n’apprendra plus à faire la guerre.» L’évangéliste Jean ajoute, dans son Apocalypse 21, 4-5 : «Voici la demeure de Dieu avec les hommes. Il aura sa demeure parmi eux : ils seront son peuple, et lui, Dieu-avec-eux, sera leur Dieu. Il n’y aura plus de pleur, de cri et de peine, il n’y en aura plus, car l’ancien monde s’en est allé... Voici que je fais l’univers nouveau».
La Christ, à travers S. Paul nous donne la clé qui permet d’arriver à la paix véritable : Entre nous, il n’y a ni juifs ni grecs, ni esclaves ni hommes libres, ni hommes ni femmes... Tous nous sommes égaux, tous nous sommes les fils et les filles de Dieu...»
La paix de Dieu est bien différente de celle des hommes : «C'est la paix que je vous laisse, c'est ma paix que je vous donne. Ce n'est pas à la manière du monde que je vous la donne...» (Jean 14, 27). Non pas la «pax romana», la paix conquise par les armes, non pas la paix du plus fort qui écrase les plus faibles, non pas la paix imposée par la force.
Un vieux dicton qui nous vient de l’Inde dit : «Pour que la forêt soit verte, il faut que les arbres soient verts». Cette pensée de sagesse orientale s’applique aussi à la paix. Pour que notre monde soit en paix, il faut que les hommes et les femmes de notre siècle soient en paix. Chacun de nous peut devenir, dans son petit coin de monde, un fils ou une fille de la paix, apportant ainsi sa contribution à la paix universelle. Des millions de personnes agressives et vindicatives ne peuvent créer un monde de paix…
Si nous réussissons à faire briller notre visage de paix sur les autres, cette paix s’élargira : paix dans nos familles, paix dans notre communauté et dans notre ville, paix dans notre église... paix sur la terre parce que Dieu nous aime. C’est le souhait que nous offrons au début de cette nouvelle année.
S. François d’Assise a composé cette belle prière : «Seigneur, fais de moi un instrument de ta paix : là où il y a la haine, que j’apporte l’amour; là où il y a l’offense, que j’apporte le pardon; là où il y a la discorde, que j’offre l’union; là où il y a le doute, que je propose la foi; là où il y a l’erreur, que je propose la vérité; là où il y a le désespoir, que j’apporte l’espérance; là où il y a la tristesse, que j’apporte la joie; là où sont les ténèbres, que je sois un instrument de lumière. Fais Seigneur que je ne cherche pas tellement à être consolé qu’à consoler, à être compris qu’à comprendre, à être aimé qu’à aimer… parce que c’est en donnant que je reçois, en pardonnant que je suis pardonné…»
Marie qui conservait en son coeur tout ce qui se passait dans sa vie et dans son monde de violence, Marie qui a du se rendre dans les montagnes de Bethléem afin d’obéir à l’édit de César Auguste, elle qui a fui en Égypte avec Joseph afin de sauver leur enfant, Marie a reçu avec reconnaissance la bénédiction que l’on retrouve dans la première lecture de ce jour, bénédiction qui se transmet de génération en génération depuis plus de trois mil ans : «Que le Seigneur te bénisse et te garde! Que le Seigneur fasse briller sur toi son visage, qu'il se penche vers toi! Qu'il t'apporte la paix!»
Je vous souhaite une bonne et heureuse annnée, pleine de joie, de soleil, de paix et de bonheur.
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Source des images: (1) Méditation, par Rembrandt, Musée du Louvre.