Par le Père Yvon-Michel Allard, s.v.d., directeur du Centre biblique des Missionnaires du Verbe Divin, Granby, QC, Canada.
Mt 13, 1-9
(Lecture brève)
Ce jour-là, Jésus était sorti de la maison, et il était assis au bord du lac. Une foule immense se rassembla auprès de lui, si bien qu’il monta dans une barque où il s’assit; toute la foule se tenait sur le rivage.
Il leur dit beaucoup de choses en paraboles: «Voici que le semeur est sorti pour semer. Comme il semait, des grains sont tombés au bord du chemin, et les oiseaux sont venus tout manger. D’autres sont tombés sur le sol pierreux, où ils n’avaient pas beaucoup de terre; ils ont levé aussitôt, parce que la terre était peu profonde. Le soleil s’étant levé, ils ont brûlé et, faute de racines, ils ont séché. D’autres grains sont tombés dans les ronces; les ronces ont poussé et les ont étouffés. D’autres sont tombés sur la bonne terre et ils ont donné du fruit à raison de cent, ou soixante, ou trente pour un. Celui qui a des oreilles, qu’il entende!» (Mt 13, 1-9)
La parabole, en tant que genre littéraire, était très présente dans la littérature hébraïque. Nous en connaissons environ trois mille et Jésus les utilisait souvent. Il excelle à les raconter et le rabbin Klausner, de l’Université hébraïque de Jérusalem, disait que le chef-d’oeuvre de la littérature juive était les paraboles de Jésus.
Le mot «parabole», en hébreu «mâchâl», signifie «récit symbolique destiné à faire découvrir un sens caché». La parabole ne s’impose pas, elle propose, elle éveille. Elle manifeste un grand respect pour les auditeurs et s’adresse à la capacité d’imagination de celui et de celle qui l’écoutent.
Pendant trois dimanches consécutifs, nous allons entendre les sept paraboles que Matthieu a regroupées dans le troisième grand discours de son évangile. Jésus est alors à un tournant difficile de son ministère : il se heurte à l’hostilité ouverte des chefs religieux qui ont décidé de le supprimer et à l’indifférence des foules qui sont déçues par ce messie qui refuse de passer à l’action politique.
Dans la parabole du semeur, l’intérêt de Jésus est dirigé vers la semence du Royaume de Dieu. En réponse à cette semence, les premiers chrétiens avaient la préoccupation de devenir graduellement de la bonne terre pour la bien recevoir.
La parabole du semeur est d’abord et avant tout une invitation à l’espérance.
Malgré tous les obstacles, la récolte sera bonne, dit Jésus : du 30, du 60, du 100 pour 1. Les résultats annoncés dépassent de beaucoup toutes les espérances des fermiers de son temps. Ils pouvaient attendre, pour une très bonne récolte, entre du 5 et du 8 pour 1. La parabole du semeur est donc d’abord et avant tout une invitation à l’espérance.
Pendant les mois d’été, nous avons plein d’expériences dans nos jardins et nos carrés de fleurs. Les légumes et les fleurs poussent en abondance et, dans les champs, nous voyons apparaître le blé, le mil, le trèfle, l’avoine le maïs et l’orge. La semence est tombée dans la bonne terre et elle produit en abondance. Cependant, nous savons aussi qu’il n’est pas toujours facile de réussir ses semences. Il y a trop de pluie ou pas assez, trop peu de soleil, trop de moustiques, trop de petits animaux, etc.
Jésus connaissait les obstacles que la Parole de Dieu rencontrait. Mais il savait aussi que cette Parole avait le pouvoir de transformer un terrain rocailleux en terre d’abondance. Isaïe nous dit dans la première lecture : «De même que la pluie et la neige descendent des cieux et n’y retournent pas sans avoir arrosé la terre, sans l’avoir fécondée et l’avoir fait germer pour fournir la semence au semeur et le pain à manger, ainsi en est-il de la parole qui sort de ma bouche, elle ne revient pas vers moi sans effet, sans avoir accompli ce que j’ai voulu et réalisé l’objet de sa mission.» (Isaïe 55, 10-11). La Parole de Dieu donne du fruit en abondance et elle peut transformer «nos coeurs de pierre en coeur de chair».
Dans la Bible, les hommes et les femmes ne sont pas divisés en deux catégories : ceux et celles de la bonne terre et ceux et celles des terrains improductifs. Chacun et chacune d’entre nous représente, à certains moments de notre vie, les différents terrains mentionnés dans la parabole.
Il y a d’abord la semence qui tombe sur le bord du chemin. Ceci représente les périodes où trop de choses prennent toute la place et risquent d’étouffer notre foi. «Vous comprenez, j’aimerais bien être à l’écoute de la Parole de Dieu le dimanche ! Mais, j’ai mes fêtes de famille, les sports à la télé, les voyages organisés, le cinéma, le théâtre et le tennis, le ski l’hiver et le golf l’été... et puis, il y a la fatigue de la semaine, alors je profite du week-end pour me reposer...». Et la rencontre avec Dieu passe après tout le reste.
Il y a les terrains rocailleux qui rendent notre foi superficielle et éphémère. La jeune pousse fait des racines mais elle n’a pas de profondeur et est vite brûlée par le soleil, avant d’avoir grandi. La superficialité peut arrêter toute croissance de la vie chrétienne, même après l’enthousiasme des débuts.
Il y a aussi les terrains avec des épines. La foi est alors étouffée par «les soucis du monde et la tromperie de la richesse». Jésus n’a cessé de mettre en garde contre l’ambiance matérialiste de notre civilisation. Bien sûr, nous avons besoin d’argent, de confort, de détente, de biens matériels, mais on ne peut se restreindre aux biens de consommation. La foi risque alors de disparaître : «L’homme ne vit pas seulement de pain».
Le Seigneur a raconté cette parabole du semeur afin de souligner la générosité de Dieu qui sème à tous les vents.
Malgré tous les échecs,
la récolte sera bonne.
Le Seigneur a raconté cette parabole du semeur afin de souligner la générosité de Dieu qui sème à tous les vents. Il a confiance en nous et invite tout le monde à devenir de la bonne terre. Malgré tous les échecs, nous dit le Christ, la récolte sera bonne.
C’est une belle parabole dans un temps difficile. Nos paroisses sont en mode de «décroissance» et plusieurs églises doivent fermer leurs portes. Il est décourageant de voir que très souvent les jeunes ne participent plus aux offices religieux et ne transmettent plus la foi à la génération montante.
«Ne vous découragez pas», nous dit le Seigneur : «annoncez la bonne nouvelle de l’évangile dans votre vie, semez généreusement et un jour cela portera du fruit».
Voici que le Semeur est sorti pour semer