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Réflexion sur l'évangile du 5e dimanche de Pâques, A

Par le Père Yvon-Michel Allard, s.v.d., directeur du Centre biblique des Missionnaires du Verbe Divin, Granby, QC, Canada.

 



 

 

Jean 14, 1-12

À l’heure où Jésus passait de ce monde à son Père, il disait à ses disciples: «Ne soyez donc pas bouleversés: vous croyez en Dieu, croyez aussi en moi. Dans la maison de mon Père, beaucoup peuvent trouver leur demeure; sinon, est-ce que je vous aurais dit: Je pars vous préparer une place? Quand je serai allé vous la préparer, je revien-drai vous prendre avec moi; et là où je suis, vous y serez aussi. Pour aller où je m’en vais, vous savez le chemin.» 

Thomas lui dit: «Seigneur, nous ne savons même pas où tu vas; comment pourrions-nous savoir le chemin?» Jésus lui répond: «Moi, je suis le Chemin, la Vérité et la Vie; personne ne va vers le Père sans passer par moi. Puisque vous me connaissez, vous connaîtrez aussi mon Père. Dès maintenant vous le connaissez, et vous l’avez vu.» 

Philippe lui dit: «Seigneur, montre-nous le Père; cela nous suffit.» Jésus lui répond: «Il y a si longtemps que je suis avec vous, et tu ne me connais pas, Philippe! Celui qui m’a vu a vu le Père. Comment peux-tu dire: <Montre-nous le Père>? Tu ne crois donc pas que je suis dans le Père et que le Père est en moi! 

«Les paroles que je vous dis, je ne les dis pas de moi-même; mais c’est le Père qui demeure en moi, et qui accomplit ses propres oeuvres. Croyez ce que je vous dis: je suis dans le Père, et le Père est en moi; si vous ne croyez pas ma parole, croyez au moins à cause des oeuvres. Amen, amen, je vous le dis: celui qui croit en moi accomplira les mêmes oeuvres que moi. Il en accomplira même de plus grandes, puisque je pars vers le Père.»

 

5e dimanche de Pâques - A

père Yvon-Michel Allard


"Celui qui croit en moi accomplira les mêmes oeuvres que moi"

 

Saint Jean nous propose aujourd’hui le début du discours de Jésus pendant la dernière scène. Il utilise les paroles du Seigneur lui-même pour nous donner un aperçu de sa personnalité et faire un résumé de son message.

Ayant lavé les pieds de ses disciples, annoncé la trahison de Judas et prédit le reniement de Pierre, Jésus donne ses dernières recommandations aux siens. Il évoque son départ prochain. Mais il ajoute qu’il reviendra les chercher. Ils n’ont donc pas à être bouleversés.

Lorsque saint Jean écrit son évangile, plus de 60 ans après la mort de Jésus, les chrétiens souffraient de discrimination et de persécution. Ils avaient été chassés des synagogues et avaient perdu le contact avec leurs communautés respectives. Ils étaient considérés comme des ennemis publics par les Romains et comme des hérétiques par leurs compatriotes Juifs. C’était pour eux un temps de grandes souffrances. Dans ce contexte difficile, les paroles réconfortantes de Jésus sont bienvenues : «Ne soyez pas bouleversés. Vous croyez en Dieu, croyez aussi en moi.»

Dans nos vies, nous vivons parfois des heures semblables à celles des premiers chrétiens et des peurs angoissantes s’abattent sur nous, à cause d’un avenir incertain, une fracture dans nos relations, une crise économique imprévue, un handicap débilitant, une maladie incurable, une sérieuse diminution physique qui accompagne la vieillesse, etc.

À nos drames individuels, s’ajoutent les craintes collectives : le chômage, la violence, la surpopulation, la faim dans le monde, la pollution, les conflits qui se multiplient.

Dans notre Église, la pratique religieuse diminue, les changements se multiplient, les églises se vendent, le clergé vieillissant ne répond plus aux besoins, un vent de panique gagne même les plus fidèles qui parfois ont l’impression que rien ne va plus.

...la «pratique religieuse» consiste avant tout à incarner dans nos vies les exigences de l’Évangile, c’est-à-dire savoir se mettre au service des autres.

À travers ces tempêtes de la vie, le Christ nous rassure et nous offre une direction et une protection : «Je suis avec vous tous les jours... Je suis le chemin, la vérité et la vie». Alors comme Pierre, nous pouvons faire confiance et répondre au Seigneur qui nous demande si nous voulons le quitter nous aussi : «Seigneur, à qui irions-nous? Tu as les paroles de la vie éternelle.» (Jean 6, 68)

L’évangile d’aujourd’hui rappelle que nous sommes appelés non seulement à croire en Jésus mais aussi à utiliser nos talents pour faire ce qu’il a fait. «Celui qui croit en moi fera, lui aussi, les œuvres que je fais» : apporter le réconfort à ceux et celles qui sont affligés, accompagner les malades, protéger les faibles et les vulnérables, manger avec les pécheurs, défendre le droit des opprimés, dénoncer l’injustice. Nous sommes les mains, les pieds et le cœur, le corps du Christ dans notre monde.

Pour Jésus, le plus important n’est pas l’activité du culte, mais la qualité de la vie : «Je suis venu pour que vous ayez la vie et l’ayez en abondance». C’est pourquoi les temples de pierre seront toujours moins importants que les temples vivants que nous sommes. La disparition de nombreuses églises et le fait d’être une minorité ne nous empêchera pas de vivre notre christianisme et n’affectera pas la qualité de nos engagements chrétiens.

La première lecture d’aujourd’hui est révélatrice de l’importance du service pour les chrétiens. Lorsque les disciples, après la résurrection, commencèrent à comprendre le message de Jésus, ils se donnèrent des structures qui correspondent à son enseignement : ils instituèrent des diacres pour servir aux tables, prendre soin des veuves, aider les pauvres, visiter les malades. C’est là la toute première structure de l’église. C’est un symbole très significatif qui nous rappelle que la «pratique religieuse» consiste avant tout à incarner dans nos vies les exigences de l’Évangile, c’est-à-dire savoir se mettre au service des autres.

S. Jean qui était si près de Jésus a bien compris cet enseignement fondamental du Seigneur.  Dans son évangile, il nous raconte «le lavement des pieds» mais ne mentionne pas «l’institution de l’eucharistie». L’eucharistie était pourtant très importante pour lui et, lorsqu’il écrit son évangile, plusieurs dizaines d’années après la mort et la résurrection du Christ, les chrétiens se réunissaient chaque dimanche, «le premier jour de la semaine» pour «rompre le pain» (célébrer l’eucharistie). Mais Jean veut souligner que cette célébration de l’eucharistie ne prend toute sa valeur que si nous sommes au service les uns des autres, comme le Christ l’a été durant sa vie et comme il a voulu le souligner par le lavement des pieds.

Le Christ a été pour nous non seulement un «maître spirituel» mais aussi un exemple vivant de ce que nous devons faire dans notre vie de tous les jours.

«Celui qui croit en moi accomplira les mêmes oeuvres que moi»