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Réflexion sur l'évangile du Troisième dimanche du Carême, C

Par le Père Yvon-Michel Allard, s.v.d., directeur du Centre biblique des Missionnaires du Verbe Divin, Granby, QC, Canada.

 



 

 

Luc 13, 1-9

Un jour, des gens vinrent rapporter à Jésus l'affaire des Galiléens que Pilate avait fait massacrer pendant qu'ils offraient un sacrifice.

Jésus leur répondit: «Pensez-vous que ces Galiléens étaient de plus grands pécheurs que tous les autres Galiléens, pour avoir subi un tel sort? Eh bien non, je vous le dis; et si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous comme eux. «Et ces dix-huit personnes tuées par la chute de la tour de Siloé, pensez-vous qu'elles étaient plus coupables que tous les autres habitants de Jérusalem? Eh bien non, je vous le dis; et si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de la même manière.»

Jésus leur disait encore cette parabole: «Un homme avait un figuier planté dans sa vigne. Il vint chercher du fruit sur ce figuier, et n'en trouva pas. Il dit alors à son vigneron: «Voilà trois ans que je viens chercher du fruit sur ce figuier, et je n'en trouve pas. Coupe-le. À quoi bon le laisser épuiser le sol?» Mais le vigneron lui répondit: «Seigneur, laisse-le encore cette année, le temps que je bêche autour pour y mettre du fumier. Peut-être donnera-t-il du fruit à l'avenir. Sinon, tu le couperas »

 

Troisième dimanche du Carême - C

photo du Père Allard


figuier stérileLa patience de Dieu

 

Avec le troisième dimanche du carême, le thème de la conversion, du renouveau baptismal, devient l’élément central de notre célébration eucharistique. À ce thème s’ajoute celui de la patience de Dieu.

Lorsqu’un malheur arrive, qu’il soit causé par la méchanceté des êtres humains ou par un accident de la nature, nous cherchons d’abord les coupables. C’est comme un penchant naturel qui nous pousse à accuser les autres lorsque les choses tournent mal. La recherche des responsables nous donne bonne conscience. En condamnant les autres nous nous plaçons dans le camp des bons. Ce sont toujours les autres qui sont à blâmer : les dirigeants, le système économique, la société dans laquelle nous vivons, certains individus malveillants.

Les deux événements pénibles rapportés dans l’évangile d’aujourd’hui ont dû faire une profonde impression sur les gens. Dans le premier cas, il s’agit de l’assassinat odieux de personnes en train d’offrir un sacrifice dans le Temple; dans le second, l’écroulement d’une tour qui entraîne la mort de dix-huit personnes. Survenus à Jérusalem, ces deux incidents ont dû provoquer des discussions sur le problème de la souffrance et de la culpabilité.

La prière, le jeûne et le partage peuvent améliorer la fertilité de notre terrain.

La conscience populaire, à cette époque, considérait la souffrance comme le châtiment d’une faute. En évoquant la mort violente de personnes en train de poser un geste religieux et la mort purement accidentelle provoquée par l’effondrement d’une tour, Jésus rejette l’idée qu’il faille voir dans ces drames déplorables des châtiments de Dieu. Il suggère cependant que la mort de ces malheureux devrait être matière à réflexion pour chacun de nous. En somme, Jésus fait de ces événements un appel à la conversion : «Pensez-vous que les Galiléens qui sont morts aux mains des soldats de Pilate et les victimes de la tour qui s’est effondrée étaient plus mauvais que les autres? Croyez-vous qu’ils étaient plus mauvais que vous

Jésus affirme en substance : «Vous voulez à tout prix trouver des coupables ? Et si vous commenciez par faire votre propre examen de conscience

L’évolution de l’ensemble de la Bible nous amène à renoncer à l’idée d’un Dieu punisseur, auteur des catastrophes qui frappent les hommes. Cette croyance erronée n’a pas complètement disparu : atteints de maux divers, beaucoup s’en prennent à Dieu, comme s’il intervenait régulièrement et était responsable de ce qui nous arrive : «Qu’est-ce que j’ai fait au bon Dieu pour que cela m’arrive?» «Où était Dieu lors du tremblement de terre

Le monde nous a été confié. À nous de le gérer, de maîtriser la nature, d’instaurer des rapports de fraternité. Il est vrai que le péché (la volonté de dominer, la cruauté, l’avidité, etc.) peut provoquer des ravages, mais ce n’est pas la faute de Dieu. Si la mafia, les fonctionnaires et les élus volent le bien public, ce n’est pas la faute de Dieu. Inutile d’invoquer une punition divine. Ni la mort de Jésus sur la Croix, ni le massacre des zélotes par les soldats de Pilate, ni la chute de la tour de Siloé n’ont été une punition de Dieu. Ils sont le résultat de la méchanceté de certaines personnes et de la construction d’une tour qui peut-être ne répondait pas aux normes de sécurité minimale.

Jésus, comme il le fait lors du «procès» de la femme adultère, nous renvoie toujours à notre propre conscience : «Que celui d’entre vous qui est sans péché lance la première pierre!» Avant de juger les autres, avant de juger Dieu, commençons par nous juger nous-mêmes : «Enlève la poutre dans ton œil et tu verras mieux la paille dans l’œil du voisin!» (Luc 6, 42)

Pour le Christ, nous avons tous besoin de conversion et chacun de nous est comme le figuier de l’évangile d’aujourd’hui. Nous portons peu de fruits et nous avons besoin de la patience et de la miséricorde de Dieu : «Ça fait trois ans que cet arbre ne produit pas de fruits. Coupe-le. À quoi bon le laisser épuiser le sol?».

Cependant, il ne faut pas abuser de la patience de Dieu et toujours repousser dans l’avenir notre capacité de porter du fruit. Dieu est patient, mais un jour le temps qui nous est octroyé prendra fin. L’an prochain, à pareille date, certains d’entre nous ne seront plus là. Pour quelques uns, ce sera la dernière année.

Vous avez sans doute remarqué que la parabole du figuier n’a pas de conclusion. Nous ne savons pas ce qui est arrivé à cet arbre. Il en est de même pour nous. L’avenir est ouvert. Ce  qui arrivera dépend de nous.

La patience et la sollicitude de Dieu nous sont données, non pas pour nous encourager à la paresse, à la négligence, à l’insouciance, mais pour raviver notre espérance et nous permettre de porter du fruit.

Le Carême est un temps idéal pour fertiliser notre arbre. La prière, le jeûne et le partage peuvent améliorer la fertilité de notre terrain. Le Christ nous invite aujourd’hui à profiter du temps qui nous est accordé, un temps précieux qui est un don de Dieu : «Laisse encore cette année... peut-être donnera-t-il du fruit à l’avenir».

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Source de l'image: photos.ibibo.com/photo/1476925