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Réflexion sur l'évangile du 9e dimanche du Temps de l'Église, B

Par le Père Yvon-Michel Allard, s.v.d., directeur du Centre biblique des Missionnaires du Verbe Divin, Granby, QC, Canada.

 



 

 

Marc 3, 1-6

«Il entra de nouveau dans une synagogue, et il y avait là un homme qui avait la main desséchée. Et ils l'épiaient pour voir s'il allait le guérir, le jour du sabbat, afin de l'accuser. Il dit à l'homme qui avait la main sèche : «Lève-toi, là, au milieu.» Et il leur dit : «Est-il permis, le jour du sabbat, de faire du bien plutôt que de faire du mal, de sauver une vie plutôt que de la tuer?» Mais eux se taisaient. Promenant alors sur eux un regard de colère, navré de l'endurcissement de leur cœur, il dit à l'homme : «Étends la main.» Il l'étendit et sa main fut remise en état. Étant sortis, les Pharisiens tenaient aussitôt conseil avec les Hérodiens contre lui, en vue de le perdre.»

9e dimanche du Temps de l'Église - B

photo du Père Allard


Jésus entra de nouveau dans une Synagogue. Il y avait là un homme dont la main était paralysée

Jésus était un Juif «pratiquant» et, chaque samedi il assistait aux cérémonies du Sabbat. Il faut savoir que le Sabbat était, pour les juifs fidèles, un jour du repos, jour de la prière, jour de rencontre avec la famille et les amis. C'est pour préserver la qualité exceptionnelle de ce jour hebdomadaire unique que la tradition rabbinique a entouré le sabbat d'une série impressionnante de défenses. Ils avaient retenu trente-neuf actions interdites, pour sauvegarder à tout prix ce jour de repos, de prière et de rencontres.

On aurait pu s’attendre à ce que Jésus soit d'accord avec ces
fidèles, soucieux d'appliquer la Loi dans toute sa rigueur. Mais Jésus se fait de Dieu une tout autre idée que celle d’un Dieu tatillon qui impose toutes sortes de restrictions souvent inutiles. Sa réponse est d'une audace inouïe : il ose justifier ceux qui transgressent la Loi, en se servant même d'un passage d'Écriture (I Samuel 21, l-7). Le geste de David avait toute l'apparence d'une transgression sacrilège. David, chef de bande, entre avec ses soudards dans le sanctuaire de Nob. Aucun laïc ne pouvait toucher aux pains sacrés. Chaque Sabbat, les pains étaient renouvelés et les pains anciens étaient mangés sur place par les prêtres! Or, voilà que les hors-la-loi de David se jettent dessus et les mangent... Mais le pire c'est que Jésus est d'accord. Et il justifie leur geste des soldats de David simplement par le fait «qu'ils avaient faim!». Au nom d'un simple «besoin humain», un homme a le droit de transgresser une loi cultuelle. Le besoin humain l'emporte sur une loi du culte, si claire soit-elle. Jésus renverse ici la morale traditionnelle de son temps : toute «loi», qu'elle vienne de de Dieu ou des hommes, est au service de l'homme! La simple besoin essentiel de l'homme qui a faim a plus de prix aux yeux de Dieu que toutes les observances légales.
Jésus rappelle ensuite que le Sabbat a été institué non seulement pour le repos des gens mais aussi pour «faire le bien». Le Deutéronome nous rappelle l’expérience de la sortie d’Égypte (Dt 5, 15). Dieu a libéré son peuple de l’esclavage… son peuple devra à son tour venir en aide et libérer les autres! Le texte ajoute que Jésus est «navré, il se met «en colère», et il est révolté contre le mal qui atteint l'homme.

Le sabbat permettait aux esclaves de reprendre souffle.
À cause de l’attitude de Jésus le texte souligne que les Pharisiens, furieux, quittent la Synagogue pour faire cause commune avec les Hérodiens et planifier de faire périr Jésus. Au lieu de faire le bien, ils décident de faire périr Jésus!

Jésus nous démontre dans ce texte d’évangile que célébrer le Sabbat, ou notre propre dimanche, signifie ouvrir les yeux et le coeur aux misères qui nous entourent. Jésus ne supprime pas le sabbat, loin de là ! Il en donne la justification profonde : «Le sabbat a été fait pour l'homme.» Le sabbat permettait aux esclaves de reprendre souffle, et faisait mémoire d'un des événements majeurs de l’histoire juive : l'Exode. La dernière phrase de notre texte d'aujourd'hui (v. 15) fait un rapprochement avec la libération d'Égypte : «Tu te souviendras que tu as été esclave au pays d'Égypte, et que le Seigneur ton Dieu t'en a fait sortir par la force de sa main et la vigueur de son bras. C'est pourquoi le Seigneur ton Dieu t'a commandé de célébrer le jour du sabbat.»

Le peuple libéré par Dieu est invité à retrouver chaque semaine le sens de la liberté et de la gratuité. À plusieurs reprises le prophète Ézéchiel constate que l'abandon de la pratique du sabbat va de pair avec le retour à l'idolâtrie. «Les fils d'Israël n'avaient pas pratiqué mes coutumes, ils avaient méprisé mes lois, ils avaient profané mes sabbats et ils avaient suivi des yeux les idoles de leurs pères» (Ez 20, 24).

Le texte de l’évangile de ce dimanche nous invite donc à réfléchir sur notre dimanche chrétien. Ce «premier jour de la semaine» est un jour de repos, un jour de joie, un jour ou nous pouvons rencontrer le Seigneur et les membres de la communauté chrétienne. C’est aussi un jour où, après la liturgie, nous sommes invités à retourner dans nos milieux respectifs pour y faire le bien et rendre notre petit monde un peu meilleur, un peu plus humain. «Allez dans la paix du Christ… pour faire le bien».